Viré en janvier, en course pour le titre en février. Andrew Bynum vient sans doute de gagner la loterie, et pourtant, il n'a pas fait grand chose pour. En deux ans, il est passé du statut d'All-Star à celui d'agent libre aux blessures et aux controverses récurrentes. Mais pourquoi Indiana l'a choisi ?
- Colosse aux genoux d'argile
Le CV d'Andrew Bynum est déjà bien garni a seulement 26 ans : sept ans aux Lakers, deux titres dans un système bien huilé, avec deux All-Stars et un Phil Jackson qui l'a mis très tôt dans la lumière. Tour de contrôle dans la raquette avec ses 2,11 m, il s'impose progressivement à une période où les vrais pivots sont une rareté en NBA.
La saison 2011-12 finit de confirmer son statut d'All-star : il aligne 18.7 points et 11.8 rebonds par match, et est nommé membre du deuxième meilleur 5 de la ligue. Bynum fera pourtant ses valises dès l'été suivant pour laisser sa place au seul homme qui peut alors lui faire de l'ombre à son poste, Dwight Howard. Le leader du Magic est certes meilleur statistiquement et on se dit à l'époque que les Lakers sont gagnants pour d'autres raisons.
Car, derrière les performances en constante évolution, il y a surtout un joueur rongé par des problèmes de genoux qui n'ont fait que s'amplifier depuis 2007. Bynum n'a en effet joué que deux saisons complètes dans sa carrière. Au moment des négociations avec le Magic, Orlando n'a d'ailleurs pas voulu accueillir le pivot en raison notamment d'inquiétudes sur l'état de ses genoux. C'est ainsi qu'il s'est retrouvé en partance pour Philadelphie, où il aura passé un an sans jouer une seule fois à cause de blessures. Il fait son retour en ce début de saison à Cleveland, mais il ne participe qu'à 24 matchs avec des stats en forte baisse (8.4 points, 5.3 rebonds en 20 minutes par match, seulement 41 % aux tirs!).
- Un sale caractère
En plus des pépins physiques, Andrew Bynum s'est fait une réputation au fil des années de joueur qui n'en fait qu'à sa tête. Il faut dire que sa situation aux Lakers l'a habitué au succès très tôt. Plus jeune basketteur à jouer un match en NBA à tout juste 18 ans, double-champion à 22 ans, Bynum a tout eu dès le début, exactement comme un certain Kobe Bryant, sauf la maturité.
Il n'accepte pas la défaite, quitte à dépasser les limites : l'exemple le plus marquant remonte au sweep subi par les Mavericks en 2011, où sur le dernier match il se fait expulser du parquet après un coup de coude bien senti sur JJ Barea. Bynum fait les choses à sa manière : loup solitaire pendant certains temps-morts l'année suivante, il est même sanctionné par l'équipe pour son manque d'intégration au groupe.
Et le changement ne viendra pas avec son départ pour Philadelphie : alors que les Sixers lui ont laissé plusieurs semaines pour guérir son genou, il crée la polémique en se blessant en jouant au bowling. L'état physique de Bynum et ses relations avec l'organisation ne font ensuite qu'empirer. Cleveland sera l'apothéose : dans une équipe qui va se découvrir de nombreux conflits internes, il se montre inconstant, shoote beaucoup pour un temps de jeu limité (avec un splendide 0 sur 11 juste avant Noël contre Detroit) et réussit à se faire virer du groupe après trois mois de compétition pour mauvais comportement.
Les Cavs le transfèrent à Chicago qui va s'empresser de le virer. Les Bulls préfèrent économiser 20 millions de dollars plutôt que d'intégrer celui qu'on annonçait il y a moins de deux ans comme le deuxième meilleur pivot de la ligue.
- Quel intérêt pour Indiana ?
Les Pacers prennent-ils un risque en intégrant un joueur amoindri physiquement et caractériel à un groupe bien carré qui n'a en tête que le trophée Larry O'Brien ? Ils ont besoin d'une présence physique supplémentaire au poste 5. Derrière Roy Hibbert, Ian Mahinmi n'apporte pas un rendement offensif suffisant. Andrew Bynum sera là pour compléter le temps de jeu du pivot titulaire, une vingtaine de minutes de jeu hors du banc.
C'est pour lui une opportunité de jouer un rôle qui prend en compte ses limites physiques actuelles, tout en apportant une expérience de champion qui manque à l'effectif des Pacers. Bynum semble avoir besoin de fortes ambitions pour fonctionner et Indiana lui apporte sur un plateau.
Bynum sera un rouage en plus dans la machine qui se doit d'être solide, mais qui ne va pas détraquer tout le système. De la même manière que son absence prolongée lors des saisons 2008 ou 2009 n'a pas empêché les Lakers de tracer leur route jusqu'aux Finales. Toute sa carrière, il aura été un facteur X.
« L'équipe ne doit pas s'adapter à Andrew Bynum. Il doit s'intégrer dans un système qui fonctionne déjà.» - Brian Shaw, coach des Nuggets, ancien assistant chez les Lakers et les Pacers.
Et puis quelle que soit sa réussite dans l'équipe de Frank Vogel, son acquisition est forcément un joli coup de communication pour la franchise. À l'heure où son principal adversaire Miami veut faire revivre le mythe Greg Oden, Indiana place une nouvelle carte qui va faire travailler les méninges des dirigeants du Heat, un outsider imprévisible qui débarque en février et qu'il faudra prendre en compte en vue des finales de conférence.