Les Celtics n’ont pas été épargnés par les blessures puisque leurs recrues phares de la période estivale ont rejoint l’infirmerie. Privés de Gordon Hayward et Kyrie Irving, les hommes de Brad Stevens n’en demeurent pas moins performants et démontrent que le basket est bel et bien un sport collectif. On pourrait en douter après avoir visionné un match de Russell Westbrook mais Dieu merci, OKC s’est fait sortir. Bref, le sujet n’est pas là et nous porterons notre attention sur l’actuel meneur titulaire des C’s, l’homme qu’on surnomme désormais Scary Terry !
La première fois que j’ai vu jouer Terry Rozier, je fus agréablement surpris et je ne pus réprimer un « il a quelque chose » ! Agressé par sa thougness, mes yeux l’ont été et c’est ainsi que je suis tombé amoureux du super sub des Celtics. Pas d’amalgame, je vous rassure - et de toute manière Miss Kentucky est sur ses côtes ! - mais associé à Marcus Smart, l’ancien pensionnaire de Louisville m’a fait forte impression ! J’en avais d’ailleurs fait part à mon acolyte de l’époque – I miss you Marco – et la réponse ne s’était pas fait attendre « il faut sauter Isaiah Thomas ». Pour rappel, celui-ci effectuait une saison dantesque sous le maillot des Verts... Nous sommes au mois de mai 2018 et Rozier mène d’une main de maître les Green depuis le début des playoffs ! Visionnaire ? Du tout ! Eyes don't lie !
Une surprise ? Pas tant que ça lorsqu’on se remémore la saison régulière et sa titularisation du 31 janvier dernier suite aux blessures respectives de Smart, Irving et Larkin. Lors de cette rencontre, Rozier s’est montré très incisif en réalisant son premier triple double en carrière cumulant par la même occasion un +/- de + 32 sur la rencontre. Il fut d'ailleurs à cette occasion le second joueur de l'histoire de la ligue à réaliser un triple-double lors de sa première titularisation. Un signe annonciateur surtout lorsqu’on sait que deux jours plus tard c’est encore lui qui inscrit un shoot important pour donner l’avantage aux siens face aux Hawks à 14 secondes de la fin du match. Une belle histoire pour ce joueur dont la jeunesse mouvementée façonna son caractère et son côté "no fear". Une attitude largement perceptible à la fin du Game 1 face aux Sixers lorsqu'une journaliste d’ESPN le questionne sur son niveau actuel, la sérénité incarnée !
Comment ne pas apprécier cette spontanéité ? Juste à travers cette séquence, on ressent comme une sorte d’évidence, comme si Rozier n’était aucunement surpris par ce qui lui arrive actuellement. Et c’est certainement le cas ! LeBron James ne s'y trompe pas et ne tarit pas d’éloges au sujet des performances du meneur de Boston :
Il devient de plus en plus confiant, soir après soir et il est dans sa troisième année. Il s’habitue mieux, beaucoup mieux. Il est très rapide, il shoote excellemment bien et se montre très agressif aussi.
Mais le King n’est pas le seul à constater cette ténacité et cette passion contagieuse qui anime Rozier puisqu’un autre All-Star - et pas des moindres - soulignait dernièrement l’état d’esprit du number 12 de la Puritan City :
Really like watchin Terry Rozier hoop...plays hard on both sides!
— Chris Paul (@CP3) 28 janvier 2018
Etre adoubé par l’un des tous meilleurs manieurs de ballon de la ligue, ce n’est pas rien ! D’ailleurs, la transition est toute trouvée puisque nous allons maintenant souligner les qualités de gestionnaire dont fait preuve Rozier depuis son intronisation dans le starting lineup et ça aussi, ce n'est pas rien !
Rozier a les « mains sures », une qualité essentielle pour un meneur de jeu qui – malheureusement – est de moins en moins répandue de nos jours chez les meneurs de jeu ! Il perde en moyenne moins de deux ballons par match et fait preuve d'énormément de maîtrise en playoffs. C’est à signaler lorsqu’on sait que les responsabilités et le temps de jeu de Rozier ont évolué de façon exponentielle au fil des dernières semaines. C'est remarquable même ! Souvenez-vous d’ailleurs de ses deux premiers matchs face aux Bucks lors du round 1 où il avait totalisé 46 points à 47 % aux shoots et 11 passes décisives sans perdre le moindre ballon ! On parle bien d’un joueur starter pour la première fois de sa carrière en playoffs !
Avant son arrivée en NBA, les scouts ont en effet pointé du doigt les lacunes de Rozier et notamment ses limites concernant son habileté à mener le jeu. Considéré comme un mauvais playmaker, les reports ont mis en en lumière ses difficultés sur pick-and-roll et son incapacité à distribuer correctement le jeu. Le travail paye et depuis maintenant plusieurs semaines, Rozier l’illustre à merveille ! Scary Terry est maintenant devenu un meneur NBA solide et plusieurs statistiques viennent donner du relief à cette affirmation.
Depuis le début de la postseason, Rozier ne perd en moyenne que 1,3 ballons par match alors qu’il joue en moyenne 37,3 minutes soit le cinquième plus gros temps de jeu parmi les meneurs durant ces playoffs. Au total, Rozier n’a perdu que 16 ballons en 12 matchs. A titre de comparaison, Westbrook en a perdu 31 en 6 matchs tandis que John Wall ne fait pas mieux avec 27 turnovers pour autant de matchs ! Mieux encore, le ratio passes décisives/turnovers de Rozier est le plus élevé de ces playoffs avec 4.31, il se positionne même devant des meneurs références tels que Rajon Rondo (3,33) et Chris Paul (3,7). C’est dire la crédibilité de la tenue de balle du bonhomme et les énormes progrès qu’il a réalisé depuis son arrivée dans la Grande Ligue. Nous avons ici la définition même du "vrai" bosseur, une elite work ethic selon son propre coach au sortir de la draft !
Ces statistiques sont impressionnantes car elles sont réalisées dans le cadre des playoffs où les systèmes défensifs, la répétition des matchs et l’ajustement des stratégies ne sont pas sans mener la vie dure aux meneurs de jeu. On ne peut que respecter le sérieux du joueur et finalement, sa propension à faire mentir les scouts !
Terry Rozier est un meneur complet et c’est ce qu’on apprécie chez lui ! Il ne contente pas de jouer uniquement lorsqu’il a la balle en main. Il est ce type de joueur qui demeure en activité, il bouge en permanence. On a l’impression qu’il ne reste jamais immobile et que ses dépenses énergétiques sont sans limites ! Preuve en est, Rozier est le second joueur à avoir parcouru le plus de distance lors du dernier tour de playoffs et il se positionne à la 5ème place dans cette catégorie statistique depuis le début des playoffs. Cette opiniâtreté, cette dureté est dans l’ADN du joueur, c’est quelque chose qui lui a permis de surmonter les épreuves de la vie et qui l’accompagne depuis son plus jeune âge :
La dureté c’est quelque chose que vous ne pouvez pas enseigner. C’est juste imprégné en vous. C’est comme lorsqu’un petit joueur se bat dans la peinture pour récupérer le rebond, cela montre sa ténacité. C’est l’histoire de ma vie.
L’activité de Rozier se ressent au rebond et contribue à alimenter directement l’attaque. Dès la récupération du rebond, Rozier s’attèle à remonter vite le terrain et ce n’est pas surprenant de le retrouver en tête des points inscrits sur fastbreak pour les Celtics. C’est aussi le joueur des Celtics qui touche le plus de ballons par match avec une moyenne de 87,7 touches, qui effectue le plus de passes dans un match avec 67,3 et qui reçoit le plus de passes avec 71,7. C’est dire le rôle majeur qu’il joue au sein du collectif administré par Brad Stevens. Pas étonnant donc d’observer que l’offensive rating de son équipe diminue largement en son absence, passant de 110,9 à 96,5.
L’adresse à 3 points de Rozier - 41,5 face aux Sixers - est cruciale depuis le début des playoffs et on observe que le joueur est capable de convertir ses shoots de différentes manières. Il est en mesure de créer son propre shoot que ce soit par le biais de step back ou de pull-up jumpers mais aussi grâce au mouvement sans ballon. Un comportement qui vient renforcer cette idée « d’hyperactivité » puisque Rozier trouve d’excellentes positions de shoot par l’intermédiaire de ses déplacements. Stephen Curry excelle dans ce domaine et Rozier démontre aussi qu’il possède cette habilité à trouver intelligemment les espaces libres… Décidément…
Reconnu comme un excellent défenseur à Louisville, Rozier impose une pression tenace sur son adversaire direct et on vous laisse imaginer l’impact sur le backourt adverse lorsqu'il est associé à Marcus Smart ! Rozier ne triche pas et c’est d’ailleurs le joueur de Boston à récupérer le plus de ballons perdus - 13 face aux Sixers ! - un exploit lorsqu’on sait que l’intéressé cohabite avec Smart. C’est également un défenseur perspicace, capable de couper les lignes de passes à tout moment grâce à sa vitesse et son envergure comme nous avions pu le constater lors du Game 3 face aux Sixers où il intercepta deux ballons pour maintenir les siens à flot.
En définitive, Terry Rozier est un athlète incroyable avec une éthique de travail en phase avec le niveau attendu en NBA. Compétiteur exceptionnel, il produit des efforts considérables sur le terrain ce qui en fait un joueur d’impact pour les Celtics. À bien des égards, Rozier est la quintessence de cette équipe de Boston et à la veille des finales, on imagine mal le natif de l’Ohio trembler :
Quand une opportunité se présente, vous devez la saisir et en tirer avantage. C’est ce qui me définit.
On l’avait bien compris Scary Terry… LeBron le sait aussi… War is coming !