San Antonio aurait du gagner en 2012 : 20 victoires de suite, dix en play-offs, en faisant de la bouillie du Jazz et des Clippers... le Thunder mené deux à zéro allait subir un châtiment comparable avant que les Spurs ne foncent jusqu'aux Finales.
Mais la bande à Scott Brooks a épuisé le réservoir adversaire pour remporter le troisième puis le quatrième match. Pas grave se dit-on, Duncan et Parker ne vont pas perdre le pivotal game 5 à la maison. Pourtant, Kevin Durant clôture ce 4 juin une victoire 108-103, un coup de massue avant de finir le travail à la maison.
Comme une évidence, les deux formations rejouent ce même acte ce jeudi soir sur la même scène. Sans pouvoir anticiper le résultat, est-ce qu'on peut attendre le même scenario ?
- Le parcours jusqu'au Game 5
Contrairement à cette année où les Spurs ont totalement dominé les deux premiers matchs, avec un jeu bien équilibré, une très bonne adresse et l'absence d'Ibaka à l'intérieur, leurs victoires en 2012 avaient été serrées, et montraient surtout une bonne expérience des fins de matchs de play-offs.
La victoire d'OKC au troisième round avait été logique : plus de fraîcheur, une rencontre à domicile. Il est amusant de remarquer que San Antonio avait montré les mêmes problèmes d'exécution il y a deux saisons de cela : beaucoup de pertes de balle, et un jeu beaucoup trop axé sur le tir extérieur. Surtout, l'effectif paraissait fatigué après 20 succès consécutifs.
Le quatrième affrontement allait être beaucoup plus serré, avec au bout une défaite amère et difficile à comprendre pour les Spurs. Perdre en play-offs quand on shoote à 50 %, dont 47% à trois points et seulement dix pertes de balle ? C'est quasiment impossible (ce n'était d'ailleurs pas arrivé depuis 1993). Pour cela, il aura fallu un improbable et parfait 11/11 de Serge Ibaka aux tirs, pour compenser les sept points de Russell Westbrook, et compléter les 36 unités de Kevin Durant.
Après ces quatre manches, il était compliqué de dire qui avait l'ascendant. 2-2 était un bilan logique tant chaque équipe aurait pu gagner un match à l'extérieur. Le Thunder paraissait en meilleur forme physique, et montrait des ressources inattendues en attaque, et les Spurs restait un modèle d'équilibre et de distribution du jeu, avec en plus la longue expérience des matchs importants. En plus, ils allaient jouer à domicile.
- Un mauvais départ déterminant
Mais les Spurs retombent dès l'entame dans leurs travers. Alors qu'ils pourraient profiter du manque d'efficacité de leur adversaire, ils perdent pas moins de sept ballons dans le premier quart-temps, de quoi donner au Thunder le temps de régler leur viseur. 26-21 et les locaux courent déjà derrière les jeunes loups. Les deux attaques vont être très prolifiques dans le second quart, avec 29 points cumulés inscrits en l'espace de quatre minutes. Tout le monde donne du sien, y compris Daequan Cook qui score huit points en une minute en sortie de banc, sauf... Tim Duncan qui pointe à seulement trois unités en une mi-temps et un tir rentré sur quatre. Mais San Antonio tombe en panne sèche pendant six minutes. Pas le moindre point et OKC peut doucement prendre le large (+14).
Un sursaut d'orgueil est initié par Stephen Jackson, et Parker retourne enfin effrayer la raquette adverse. À coup de paniers simples et de lancer-francs, les Spurs grapillent leur retard, et les visiteurs trop pressés de casser leur élan, multiplient les turnovers à l'entame du troisième quart-temps. Le ballon tourne intelligemment et Ginobili redonne l'avantage à son équipe avec deux coups de massue longue distance de suite. Le gaucher mène la charge mais retrouve face à lui la doublette explosive Durant-Westbrook, et est bien trop seul face à leur fougue. D'une parfaite égalité à deux minutes et demi de la sirène, les Texans encaissent un cinglant 10-1 pour finir la période. (81-72)
Encore une fois, San Antonio court après le score. Surtout, l'équipe n'arrive pas à empêcher le Thunder de répondre instantanément à ses paniers réussis. Comme si ça ne suffisait pas, et alors que Duncan commence à se réveiller, c'est James Harden qui fait son boulot de sixième homme, un coup d'accélérateur qui doit plier le match en gagnant du temps.Oui mais les visiteurs vont se faire très peur : menant de 13 points à cinq minutes du buzzer final, ils encaissent un 11-0 en quatre minutes, de quoi redonner un espoir inattendu aux spectacteurs du AT&T Center. La faute à une vilaine tendance au 1-on-1 en attaque de la part de Westbrook et Harden, qui provoquent des situations de shoot compliquées voire des pertes de balle.
Le Thunder n' a jamais l'air aussi fragile que lorsque ses joueurs forcent des isolations après avoir encaissé plusieurs paniers. Au lieu de construire pour trouver un tir facile, ils veulent rapidement casser la lancée de leur adversaire en fonçant dans la raquette adverse. Le meneur d'OKC limite la casse à mi-distance mais Duncan débarassé de Perkins répond facilement par un lay-up. 103-101 et 50 secondes au chrono. James Harden prend les choses en main et travaille Leonard à coups de cross-over, place le pas en arrière pour gagner un peu d'espace et décoche un trois points salvateur. Cinq points d'écart et un temps mort, à peine de quoi respirer pour les jeunes éclairs.
Ginobili, auteur de 34 magnifiques points ce soir-là, redonne une dose de stress aux visiteurs avec d'emblée un double-pas désarticulé dont il a le secret. San Antonio met une grosse pression sur le porteur de balle dès l'engagement et Sefolosha finit par faire sortir le ballon. Les hôtes peuvent égaliser à trois-points, et c'est évidemment Manu l'Argentin qui prend un tir en sortie d'écran. Raté et la balle sort pour le Thunder. Il ne reste plus qu'une remise en jeu à faire et OKC tient son exploit, Durant reçoit la balle et scelle le score alors que Duncan se prend la tête sur le banc. 108-103 et une grosse surprise, par le résultat mais aussi par la manière.
À y regarder de plus près, le succès d'OKC en 2012 était autant lié à une bonne distribution du jeu qu'à un two-men-show. Sur cette cinquième rencontre, les deux stars n'ont scoré « que » 50 des 108 points de l'équipe, grâce aux 12 passes de Westbrook. Quand Durant ou son sidekick écartent la défense par leur explosivité et leur fluidité, ils ouvrent des opportunités pour leurs coéquipiers.
- La même recette jeudi soir ?
La différence majeure en 2014, c'est que les deux adversaires n'ont jamais vraiment été sur le même pied d'égalité. Ils ont juste échangé leurs rôles. Les Spurs dominateurs par leur adresse se sont retrouvés largués à force d'écarter le jeu et de ne pas tenter assez de pénétrations et donc peu de lancers-francs là où le Thunder fait tout pour forcer des fautes (pour preuve : zéro tentatives pour les Texans dans le troisième quart-temps du Game 3, là où OKC a fait un 20 sur 24). En plus de mettre les deux franchises à armes égales, la deuxième victoire du Thunder a été surtout mentale : cela fait deux rencontres de suite où San Antonio perd le rythme, et semble incapable de revenir, par manque d'un joueur explosif pour relancer la machine. Le cinq de départ a paru mou excepté Parker, et la second unit texane repose trop souvent sur les exploits de Ginobili.
Oklahoma City a-t-il pour autant pris l'ascendant sur son adversaire ? Westbrook a signé un match référence, avec 40 points en 45 minutes sur le parquet. Pas sûr qu'il puisse signer une telle perf deux fois de suite. L'affrontement de 2012 a montré que même les solides Spurs n'ont pas la recette parfaite pour bloquer OKC. Mais maintenant ils le savent, et leurs adversaires n'ont pas le même arsenal qu'il y a deux ans. Le Thunder était plus jeune, plus novice, mais mieux équipé, avec un James Harden, qui s'était montré déterminant en sortie de banc, avec notamment une pointe à 30 points au deuxième match de la série. Son rôle dans ce Game 5 avait été majeur, faisant preuve d'une efficacité redoutable dans le quatrième quart-temps (12 de ses 20 points, 4/4 aux tirs dont trois tirs longue distance). Qui peut rejouer ce rôle cette saison ?