Steve Kerr Vs Tyronn Lue

Duel de génération compare une star actuelle à son alter-ego du passé. Pour clore le chapitre des Finales NBA en beauté, nous avons décidé d'opposer les deux coachs, Steve Kerr et Tyronn Lue, non pas en tant que stratège, mais en tant que joueur. En sortie de banc, les deux hommes ont en commun d'avoir été des éléments stratégiques des plus grandes dynasties de ces dernières décennies. L'un par son impact offensif, l'autre pour sa pugnacité défensive.

Avant d'être le commandant en chef des Warriors, Steve Kerr a été l'un des lieutenants de la grande équipe des Bulls des années 90 avec un rôle prépondérant dans la quête des titres. Tout comme lui, Tyronn Lue a participé aux longues campagnes de playoffs des Lakers version 2000. Pour trancher dans cette guerre des coachs un peu particulière, David enfilera donc le maillot du patron de Cleveland et Sylvain ressortira le short du guide de la Dub Nation.

 

 

Sylvain : Certains sportifs ont le don pour être toujours au bon endroit, au bon moment. Steve Kerr est de cette trempe, le Didier Deschamps de la balle orange. Sa success story commence dès 1986 où il intègre l'équipe nationale lors des championnats du monde. Composée exclusivement d'universitaires, la sélection remporte l'or en Espagne. En 1988, Kerr mène les Wildcats d'Arizona au Final Four NCAA. Son adresse est déjà sa marque de fabrique. Ses 57,3% à 3 points (114/199) séduisent les Suns qui le draftent en... 50ème position ! Il faut dire que son physique fluet et son look de steward d'avion de ligne ont de quoi rebuter les GM de l'époque.
Role player chez les Suns puis les Cavs, sa carrière NBA décolle véritablement en 1993 lors de son arrivée chez les Bulls. Le blondinet réalise, alors, sa meilleure saison au scoring (8,6 points) et devient le shooteur patenté de Chicago. Ses 52,4% de réussite longue distance lors de l'exercice 1994-95 reste la seconde performance All Time en NBA. Avec le retour de Michael Jordan, Chicago redevient le taureau ailé qui survole la Ligue. Dans le sillage de His Airness, Steve Kerr brille en sortie de banc, se montrant même clutch avec le shoot du titre en 1997, rentré depuis dans l'Histoire.
En passant chez les Spurs deux ans après, Kerr garde le momentum et remporte dans la foulée un autre titre, le premier joueur depuis les Celtics de Bill Russell à gagner quatre bagues d'affilée. Après un exil aux Blazers, Steve revient dans le Texas pour un dernier tour de piste. Agé de 37 ans, il se montre une nouvelle décisif en Finale de Conférence contre Dallas en décochant quatre flèches à 3 points qui scellent le sort des Mavs. Il raccroche définitivement ses baskets après cette dernière bague obtenue. Retour en images sur sa carrière.
 

 

David : Tyronn Lue, il faut le reconnaître, était un joueur très moyen... A peine plus performant qu'un journey man, Lue a passé la plupart du temps dans la peau d'un remplaçant, mais ce temps, il l'a passé aux côtés de certains des plus grands joueurs. Ancien meneur des Cornhuskers du Nebraska, le joueur a brillé en NCAA en étant le meilleur passeur de son équipe trois ans de suite. Ça n'impressionne pas autant que la plupart des joueurs dont on parle dans cette chronique d'habitude, mais ça suffit bien assez pour que Lue atterrisse en NBA. Les Nuggets le sélectionnent en 23ème en 1998 et l'échangent dans la foulée contre... Nick Van Exel, excusez du peu !
Aux côtés de Kobe Bryant, Shaquille O'Neal et Derek Fisher dont il est la doublure, il participe aux deux premiers titres du Three-peat des Lakers. Plutôt décevant pendant la saison, Tyronn est finalement chargé de défendre sur Allen Iverson pendant les finales 2001. Cinq matchs plus tard, les Lakers remportent un second titre d'affilée. 
Lue quitte pourtant L.A et signe à Washington. Ici, il gagne du temps de jeu et évolue aux côtés de Rip Hamilton, Christian Laettner et... oui, Michael Jordan. Il passe deux ans dans la capitale pour une vingtaine de minutes par matchs et 8.2pts de moyenne. Mais Ty' est bien parti pour ne jamais rester longtemps dans une équipe... après deux saisons, il rejoint le Magic d'Orlando et Tracy McGrady. Là, il devient enfin titulaire, 69 fois cette année, et atteint pour la première fois les 10pts de moyennes. Il récidivera l'année suivante dans une saison à cheval entre Houston et Atlanta. C'est avec les Hawks qu'il aura été le plus performant en enregistrant 11pts de moyenne en 4 ans. Par la suite, les performances du meneur ne feront que baisser et il quittera la NBA en 2009 après de brefs passages à Milwaukee, Dallas et un retour à Orlando. 

 

1-0 pour Steve Kerr : Offensivement, Kerr était primordial pour toutes les équipes pour qui il a joué. Alors que Lue n'apportait qu'une poignée de points derrière Kobe et Shaq, les tirs à 3pts de Kerr ont réellement pesés dans la balance lors de ces titres. 
 

 

 

Sylvain :  Joueur éminemment altruiste au Q.I. Basket sur-développé, Steve Kerr est l'élément de rêve pour tout coach qui se respecte. L'arrière n'aime pas tirer la couverture médiatique à lui. La star et le leader, ce n'est pas lui. Il se contente de son rôle de sniper d'élite, utilisé à dose homéopathique, lorsque le besoin de shoots de loin se fait sentir.
Lorsque Kerr décide de devenir coach, la plupart des franchises sentent le bon coup. Passé entre les mains des deux meilleurs stratèges de ces 20 dernières années, Phil Jackson et Gregg Popovich, le rookie des bancs a les bagages techniques idéaux pour s'imposer rapidement. Après un pied de nez au Zen Master, son ancien mentor, qui lui propose de redresser les Knicks, Steve opte finalement pour la Californie. Il reprend en main la franchise d'Oakland au potentiel énorme mais encore en gestation. La suite, on la connaît : le coach et ses "small boys" révolutionnent le jeu en pratiquant un basket rapide et offensif orienté sur l'adresse à 3 points... On ne se refait pas.

 

David : A défaut d'être une grande star, Lue est un joueur intelligent et un role player sur qui on peut compter. Acharné en défense et passeur correct avec 3.1pds par matchs (22mn de temps de jeu moyen pour Lue), Lue n'a jamais été un boulet pour ses coéquipiers... comme au hasard Smush Parker pour Kobe. Il n'a jamais été leader d'une équipe mais comment le devenir lorsqu'on joue avec Kobe... Shaq... T-Mac... Ou Jordan ! Lue s'est contenté de donner tout ce qu'il avait et d'apprendre le jeu avec les meilleurs avant de quitter la ligue en tant que joueur. 
Et le travail est payant puisqu'après quelques années en tant qu'assistant coach pour les Celtics et les Clippers, Lue débarque en tant que Head Coach des Cavaliers. Ty' arrive dans une équipe favorite à l'Est dans un contexte difficile, remplacer David Blatt et faire mieux que l'an dernier. Après les mastodontes qu'il a côtoyé sur le terrain, le voici chargé de diriger un quadruple MVP, LeBron James.  Lue aura l'occasion de remporter son premier titre, dès sa première année de coaching, ce dimanche dans ce match 7 qui s'annonce incroyable. 

 

2-0 pour Steve Kerr. Si aucun des deux n'a eu l'occasion d'être leader de son équipe et qu'il est difficile de les comparer sur ce point, il y a pourtant un gouffre quand on regarde leurs bilan de coach. Kerr est champion en titre et a battu le record de victoire en une saison cette année... même si Luke Walton a coaché quelques matchs également. 
 

 

 

Sylvain : L'adresse de Steve Kerr est gravée dans le marbre des tablettes NBA. A deux reprises, le petit blondinet termine avec le meilleur pourcentage de la ligue à 3 points (50,7% et 52,4%). L'artificier remporte également le 3pt Contest du All Star Game en 1997. Preuve ultime de son efficacité derrière l'arc, Steve Kerr possède le meilleur pourcentage en carrière de l'histoire NBA avec 45,4%. Sur le plan collectif, le palmarès de l'arrière est impressionnant : une médaille d'or de champion du monde, cinq titres NBA en tant que joueur et une bague en tant que coach. Si le back to back reste possible pour Kerr sur le banc des Warriors, il a d'ores et déjà posé son empreinte sur la saison en remportant le trophée de Coach of the Year.

 

David : On ne va pas se mentir, il est difficile de s'extasier devant le jeu de Tyronn Lue. Passeur correct, bon défenseur, attaquant moyen, excellent QI basket. La principale qualité du jeu de Tyronn Lue, c'est de ne pas avoir de gros défaut. Mauvais nulle part mais moyen partout, c'est ce qui résume le mieux Tyronn Lue... trop normal pour être une star comme dirait Akhenaton. Pourtant,Lue a su donner ce qu'il fallait pour être conservé assez longtemps par les Lakers pour qu'il gagne deux bagues. Deux bagues en tant que remplaçant certes, mais deux bagues de plus que Karl Malone, que Charles Barkley, qu'Allen Iverson... et autant que LeBron James pour l'instant. 

 

3-0 : Kerr inflige une énorme déculottée à son vis-à-vis, une branlée comme on n'en a jamais vu dans cette chronique. Si Lue a plus de titres que bon nombres de Hall of Famers... il n'a pas encore la moitié de ce qu'a Kerr. 

 

 

Sylvain : Steve Kerr n'est pas un grand défenseur, pas un gros rebondeur ni même un passeur prolifique compte tenu de sa position sur le parquet. Il a bâti toute sa carrière sur son adresse. Avec une longévité de 15 ans dans la ligue, c'est dire les capacités du bonhomme dans ce domaine. Sa science du jeu lui permet de ne pas être un boulet unidimensionnel pour son équipe. Incapable de se créer son propre shoot au vu de ses qualités physiques limitées, Kerr compense par un art du placement inné. En cas de prises à deux sur la star locale, il sait se montrer disponible et hérite de la gonfle pour un tir ouvert. Idem pour prendre les écrans de ses coéquipiers et obtenir un spot idéal en tête de raquette. En fin de match, Kerr a toujours fait preuve d'un tempérament de gagnant, ne refusant jamais de prendre ses responsabilités. La perte de son père, assassiné par des terroristes au Liban, a, selon ses dires, forgé son moral d'acier.

 

David : Je me répète malheureusement, il est difficile de trouver de gros points forts dans le jeu de Lue. Mais l'ancien du Neebraska était un bon shooteur, un bon dribbleur, un bon passeur, un bon défenseur... Pas assez bon pour être en avant mais assez bon pendant que les titulaires soufflait. Joueur équilibré, c'est surtout par son QI basket que Lue montre sa technique. Doté d'une bonne vision du jeu et d'une réel compréhension des tactiques,c'est en minimisant les erreurs qu'il a montré sa fiabilité et qu'il a pu décrocher ses divers contrats en NBA.

 

3-1 : Sur la plan technique, Tyronn Lue sauve l'honneur de par sa polyvalence. Moins utile à son équipe que ne l'est Kerr, Lue a l'avantage d'être efficace dans plus de registres que son adversaire de ce soir. 

 

 

Sylvain : Steve Kerr a beaucoup plus pesé dans l'histoire de la Ligue que ne laissent figurer ses 30 titularisations en 910 rencontres. Sa faculté a sortir du banc pour doper l'attaque de son équipe impose le respect. Ses shoots en playoffs dans le money time ont sauvé maintes fois Bulls et Spurs. Kerr a ce supplément d'âme (et de chance) qui fait la différence dans les moments importants. Comment expliquer sinon qu'il possède les deux meilleurs bilans de l'histoire de la NBA : 72 victoires avec les Bulls en tant que joueur et 73 succès avec les Warriors sur le banc. Sur le parquet, Kerr a poussé au maximum son potentiel pourtant limité athlétiquement. Même constat à Golden State où le coach a révélé les talents cachés de Draymond Green et sublimé la vista de Klay Thompson, tous deux devenus All Star sous sa coupe.

 

David : Quoiqu'il arrive dimanche soir, on gardera en tête que Tyronn Lue, c'est le type qui a réussi à pousser les champions en titre, recordmen du nombre de victoire en une saison, jusqu'à un match 7 en finale... et dès sa première année en tant que coach. Ok, Blatt a fait pareil l'an dernier mais lui avait déjà coaché en Europe. Ok, c'est plus facile d'aller en finale avec LeBron james mais tout le monde n'y est pas arrivé... enfin sauf les six dernières années. En tout cas,c'est grâce à Lue qu'on a pu voir l'un des plus beaux crossovers de l'histoire... on en rajoute une couche en vidéo pour le fun ! 
 

 

4-1 : Score final et victoire écrasante de Steve Kerr. On aurait aimé donner le dernier round à Lue (mon Dieu, ce cross d'Iverson !!) mais l'impact de Kerr sur la NBA est trop grand. On parle quand même d'un joueur/entraîneur qui était acteur lors deux plus beaux bilans de l'Histoire de la ligue... 72 victoires avec les Bulls, 73 avec les Warriors. Mais Tyronn n'a pas à rougir dans cette rencontre. Rares sont les coachs actuels qui auraient pu décrocher deux rounds face à Kerr... Gregg Popovich ? Jason Kidd ?. C'est surtout encore trop tôt pour Ty' mais si le jeune coach des Cavs ramène le titre à Cleveland demain... il aura fait un premier grand pas pour égaler Kerr à l'avenir !

 

Episode 15 : Antoine Walker Vs Kevin Love
Episode 14 : Ray Allen Vs Klay Thompson
Episode 13 Tim Hardaway Vs Kyrie Irving
Episode 12 : Bulls 1996 Vs Warriors 2016
Episode 11 : Lakers 2001 Vs Thunder 2016
Episode 10 : Julius Erving Vs Vince Carter
Episode 9 : Alonzo Mourning Vs Dwight Howard
​​Episode 8 : Larry Bird Vs Dirk Nowitzki
Episode 7 : John Starks Vs Jimmy Butler
​Episode 6 : Magic Johnson Vs LeBron James
Episode 5 : Scottie Pippen Vs Kawhi Leonard
Episode 4 : Dennis Rodman Vs Draymond Green
Episode 3 : Shawn Kemp Vs Blake Griffin
Episode 2 : Allen Iverson Vs Russell Westbrook
Episode 1 : Reggie Miller Vs Stephen Curry