L'été, la NBA vend en gros
L'intersaison dure, traîne et vire à la sieste quand soudain tout le monde fait son marché. À défaut d'être sexy, les transactions sont massives : neuf, 11, 13 joueurs, ça en fait des cartes à redistribuer et ça sert souvent pas à grand chose.
Pas de grosse valeur ici. Parfois des anciens All-Star, des sixièmes hommes, souvent des joueurs de banc, des droits de draft, des carrières éclairs.
Alors que les transferts de superstars comme Shaquille O'Neal en 2004, Tracy McGrady la même année, ou Jason Kidd en 2000 se déroulent généralement entre fin juin et début juillet, celles qui se déroulent un mois après se mesurent plus par quantité que par qualité. Les transactions estivales ont autant pour but d'acquérir des pièces manquantes pour des potentiels favoris que de vider des effectifs trop fournis avec plusieurs hommes sur le même poste qui se seraient battus pour des miettes de temps de jeu.
Faire un rappel de ces énormes notes de frais serait long et rébarbatif, mais il est intéressant de constater de nombreuses caractéristiques communes à ces méga transactions.
- Une spécialité des années 2000
C'est la période où la NBA s'est sentie pousser des ailes, ou plutôt des billets de banque. Après le succès médiatique et financier de l'ère Jordan dans les 90's, la bataille entre les joueurs et les propriétaires pour gagner la plus grosse part du magot a fait exploser les chiffres suite au lock-out de 1999. Ainsi, le salary cap (plafond salarial autorisé par la ligue) est passé de 26.9 millions de dollars par franchise en 1996-1997 à 53.1 millions dix ans plus tard. Pendant ce temps, le salaire annuel moyen par joueur est passé de 2.6 à 5.2 millions de dollars.
De plus en plus de joueurs ont en effet signé des contrats pour une somme maximale mais une durée plus courte qu'auparavant. En clair, tout devient plus cher et les franchises s'y mettent à plusieurs pour trouver leur bonheur sans dépasser les limites.
À partir de 1999, les transferts de huit joueurs et plus se multiplient. En août de cette année, onze joueurs sont échangés entre Houston, Orlando et Vancouver, avec pour têtes d'affiche Michael Dickerson et un Steve Francis à peine drafté. La saison suivante, New York, les L.A Lakers, Seattle et Phoenix se partagent douze joueurs. La grosse valeur ? Glen Rice, tout juste champion.
Chaque année, au moins un gros trade a lieu au début de la décennie. Le record, toujours en cours, est atteint le 2 août 2005, quand cinq équipes organisent le départ de treize joueurs, dont Antoine Walker et Jason Williams vers Miami.
Depuis la tendance s'est calmée, les franchises préfèrent jouer des futurs tours du draft plutôt que d'accueillir un illustre inconnu qu'elles vont rapidement virer. On constate néanmoins deux exceptions récentes, Carmelo Anthony en 2011 et Dwight Howard en 2012, dont la forte valeur financière a nécessité d'ajouter une dizaine d'hommes dans la balance. Pour un résultat très mitigé.
- On gagne rarement
Rares sont les coups de poker réussis dans ce type de marché. Souvent, les joueurs concernés sont des facteurs X sur lesquels on mise sans vraiment être sûr de leur efficacité. On parlait plus tôt de Glen Rice, on pourrait également citer Nick Van Exel, Eddie Jones, ou Kevin Garnett en 2013, des joueurs expérimentés mais dont les principaux faits d'arme commençaient à dater au moment où ils ont été transférés.
Si on cherche qui a été champion suite à un des ces chamboule-tout, la liste se limite à Miami en 2006 après l'acquisition de Walker, Williams et James Posey, même si leur rôle a été secondaire. On pourrait aussi citer Shawn Marion vers Dallas en 2009 parmi huit joueurs et Horace Grant direction L.A en 2001.
C'est dire si ce type de transactions n'attire pas vraiment les favoris. À moins que ce ne soit lié à l'identité de la franchise.
- C'est souvent les mêmes
Mark Cuban est sans doute le proprio le plus médiatique de la NBA, et son style exubérant semble se retrouver dans la façon dont les Mavericks font leur business. Une fois sur deux, quand un méga trade se déroule, Dallas n'est pas loin. Il faut dire que depuis que Dirk Nowitzki est là, tout se focalise autour de lui (Jason Terry est resté sept ans et il n'atteint pas la moitié du temps de jeu de l'Allemand).
Contrairement aux Spurs plutôt branchés formation, les Mavs sont capables de lâcher cinq joueurs d'un coup pour en récupérer quatre. Ils l'ont fait en 2003 pour accueillir Antawn Jamison. Et l'année d'après ils ont suivi quasiment le même plan : quatre joueurs sur le marché (dont deux à peine draftés), pour trois hommes plus les droits de draft d'un quatrième. À ce jeu, Dallas a un grand copain : Golden State, avec qui il a participé à trois transferts d'au moins huit joueurs. (D'ailleurs, les Texans en sont toujours vainqueurs).
Certains joueurs ont aussi l'habitude de faire leurs bagages lors des ventes en gros, on pense à Robert Pack et l'ex-olympien Christian Laettner, et surtout Danny Fortson parti de Boston vers Oakland (neuf joueurs concernés) en août 2000, puis trois ans après à Dallas au milieu d'un échange avec huit gars. Lors du même trade, l'inconnu Evan Eschmeyer a même du aller des Mavs aux Warriors, pour revenir en groupe un an après à Dallas et se faire virer dans la foulée.
- Les anciennes stars côtoient les mystérieux joueurs étrangers
Patrick Ewing, la légende des Knicks échangé contre Lazaro Borrell et sa carrière de 17 matchs à Seattle, forcément ça doit faire mal à l'ego. De même quand on a été des All-Stars comme Eddie Jones ou Van Exel, et qu'on sert de simple monnaie d'échange comme des joueurs de fond de banc. Ces transactions ont tendance à plomber des carrières : parfois casser le rythme de ceux qui ont encore du jus, et mettre un terme direct au voyage NBA pour les non-draftés, les journeyman, les vétérans européens dont on va se débarrasser avant le début de la saison. Alors une pensée pour les Curtis Borchardt, Raul Lopez, et Antoine Rigaudeau (!). La bataille dans la grande ligue est souvent courte pour beaucoup de joueurs, et la vente en masse tend à les faire oublier encore plus vite.