Les Kings sont-ils fous ?
Neuf ans que les Kings de Sacramento sont morts. Neuf ans de disette. Neuf saisons consécutives sans goûter aux joies des playoffs. Bien trop pour des fans habitués aux joutes exceptionnelles du début des années 2000.
2006. C'est l'année de la dernière participation des Sacramento Kings à une campagne de playoffs. À l'époque, la franchise californienne s'inclinait avec les honneurs en six matchs contre les San Antonio Spurs. Depuis, le néant... Les saisons se suivent et se ressemblent du côté des Kings. Les Californiens ne cessent de chuter dans les profondeurs de la conférence Ouest et semblent incapables de sortir de ce bourbier.
- À la recherche du temps perdu
Entre grandeur et décadence, les Kings ont tout connu durant les années 2000. Grandeur lorsqu'au début du deuxième millénaire, la franchise régalait la planète basket et tutoyait les sommets. Décadence, depuis 2006 et cette longue traversée du désert au cours de laquelle les Kings sont devenus la risée de la NBA. Tourné vers l'attaque et vers un jeu spectaculaire, Sacramento voit en effet sa cote de popularité grimper entre 2000 et 2005. Jason Williams puis Mike Bibby enchantent à la mène, Doug Christie dégoûte ses adversaires en défense et cerise sur le gâteau, Vlade Divac et Chris Webber forment un duo formidable dans la peinture. Mais les virtuoses qui composaient cette équipe redoutable et redoutée sont désormais à la retraite et les jeunes qui leurs ont succédé n'ont pas l'étoffe des rois.
Que les fastes de cette époque semblent lointains ! Depuis la saison 2006-2007, les Kings tournent en moyenne à 34% de victoire en saison régulière avec comme point culminant la saison 2008-2009 qui restera dans les annales : 17 victoires pour 65 défaites. Cette saison 2014-2015, Sacramento semblait être sur de bons rails en proposant un jeu plaisant avec un DeMarcus Cousins toujours plus imposant. La rumeur se répand vite, les rois sont-ils de retour ? Non. Le pivot de 24 ans drafté en cinquième position en 2010 se blesse, son mentor et coach Mike Malone fait ses valises et les profondeurs de la conférence Ouest accueillent de nouveau chaleureusement cette franchise qui, semble marquée par le sceau de l'instabilité et de la malchance. La franchise californienne achève sa saison avec le triste bilan de 29 victoires pour 53 défaites (13ème).
- God save the Kings ?
Avec un bilan médiocre, Sacramento hérite du sixième choix lors de la draft. Qui choisir ? Justice Winslow, Stanley Johnson et Emmanuel Mudiay sont encore disponibles. Mais les Kings jettent leur dévolu sur le bras droit de Karl-Anthony Towns à Kentucky, Willie Cauley-Stein. Un intérieur défensif capable de courir et de défendre sur les pick and roll. Un profil plus qu'intéressant pour épauler DeMarcus Cousins dans la raquette. Plutôt que de miser sur une future star, le front office décide donc de recruter un lieutenant à sa superstar et de tenter une free agency aussi tumultueuse qu'audacieuse.
Sur le marché de la free agency, les Kings ont pris d'énormes risques. Certains analystes comme Scott Davis ou encore Nate Scott s'accordent même à dire qu'ils ont effectué la plus mauvaises intersaison de la NBA. Des risques ? Oui ils ont en pris. En échange de contreparties dérisoires, les Kings ont envoyé aux Sixers de Philadelphie Nik Stauskas (drafté en huitième choix l'an passé), Jason Thompson, Carl Landry, un premier tour de draft (protégé) en 2018 avec la possibilité d'inverser leurs tours de draft en 2016 et 2017. Le but avoué de cette manoeuvre est belle et bien de dégraisser la masse salariale afin de faire venir des agents libres très convoités : Monta Ellis et Wesley Matthews. Un pari risqué et perdu par le nouveau General Manager Vlade Divac. Mais finalement, n'est-ce pas un mal pour bien ?
Aux commandes de la franchise californienne, le géant serbe est un novice en la matière mais il ne manque pas de panache. Connu pour son activité sous les panneaux, Vlade Divac a su rebondir face aux échecs cuisants de Monta Ellis parti à Indiana et de Wesley Matthews à Dallas. La venue de Marco Belinelli est bien plus qu'un lot de consolation. Artilleur à 3 points, il permettra d'écarter les défenses adverses et ainsi de laisser plus d'espace au secteur intérieur. D'ailleurs, Vlade Divac peut se targuer d'avoir effectué un coup de maître en enrôlant l'un des meilleurs back-up au poste de pivot en la personne de Kosta Koufos (5,2 points, 5,3 rebonds en 16 minutes). Pas flashy, pas hype mais très intelligent, il pourra soulager Cousins, épauler Cauley-Stein, poser de bons écrans et apporter sa dureté défensive. La nouvelle signature d'Omri Casspi est aussi une bonne chose pour les californiens. Bon shooteur à trois points, l'israélien tournait l'année dernière à 8,9 points et 3,9 rebonds en 21 minutes en sortant du banc. Voilà encore un joueur sur lequel peut s'appuyer Sacramento pour sa second unit.
- Le temps de la résurrection
Le véritable coup de poker de Vlade Divac s'appelle Rajon Rondo. Après une saison en demi-teinte entre Dallas et Boston, suivie d'une campagne de playoffs désastreuse avec les Mavericks, le quadruple meneur All-star pose ses valises en Californie pour une saison "test". Si certains y voient un ego surdimensionné de plus à Sacramento, Rajon Rondo est pour moi une très bonne pioche. Comment oublier cet excellent passeur et défenseur capable de gérer le tempo et de se sublimer en playoffs ? Comment oublier son courage et son héroïsme ce soir du 7 mai 2011, lors des demi-finales de conférence lorsqu'il joue avec un seul bras contre le Heat de Miami ? Certes, Rondo a perdu de sa superbe et reste un meneur atypique de par son shoot, néanmoins il est un gestionnaire hors pair capable de rendre meilleur ses coéquipiers en les servant dans les meilleures conditions. Qui plus est, il sera revanchard et aura à coeur de redorer son blason. Ce pari semble osé mais il peut porter ses fruits. Quel est le risque pour les Kings ? Si l'expérience tourne mal, il n'a signé qu'une année...
Sacramento n'a pas besoin d'un scoreur dans son équipe, mais de quelqu'un capable de faciliter et augmenter la productivité de ses meilleurs attaquants Cousins et Gay. Sacramento a besoin d'organisation, de QI basket et de joueurs de devoir capables de se sacrifier pour le bien de l'équipe. Et c'est exactement ce qu'ils ont fait pendant cette free agency.
- Le mystère de l'Ouest
Quel avenir pour les Kings ? Sportivement, Sacramento a une équipe intéressante avec l'un des meilleurs si ce n'est le meilleur pivot de la Ligue. Sur le papier, l'équipe laisse entrevoir une lueur d'espoir aux fans des Kings. Le trio Cousins-Gay-Rondo fait saliver et laisse présager une belle saison pour cette franchise tant décriée au cours de ces dix dernières années.
Mais de là à parler de playoffs, voilà une douce utopie pour des Kings qui partent de trop loin. En effet, les apports judicieux de cette free agency peuvent faire passer un cap à cette équipe mais l'alchimie va-t-elle réellement prendre ? D'autant plus que les titans de l'Ouest se sont eux aussi renforcés. Mise à part les Trail Blazers de Portland, les cadors semblent trop costauds pour les joutes NBA face à des Kings dont la réputation sulfureuse colle à la peau.
Si mystère des Kings il y a, il émane principalement de la direction même de cette franchise. Les relations tumultueuses entre le propriétaire Vikek Ranadivé et son GM Vlade Divac lui même en conflit avec le coach George Karl, sont sources d'instabilité. Le désaccord entre Divac et Karl à propos du franchise player DeMarcus Cousins en est l'illustration parfaite. Avant même d'entamer la saison, des problèmes internes fragilisent les Kings, ce qui n'est pas de bon augure à l'approche d'une saison capitale avant la renégociation du salary cap et ses conséquences sur les rosters. Des décisions devront être prises rapidement pour redonner une cohésion à la franchise californienne si elle ne veut pas être dénigrée pour une dixième année consécutive.
Les Sacramento Kings sont tout de même sur la bonne voie mais ils doivent toujours faire face à leurs démons, comme le souligne Tom Ziller :
Gagner est un remède et il semble que les Kings peuvent gagner plus de matchs que sur les sept dernières années. Cela peut paraître aberrant, mais 38 victoires permettraient de dissiper les inquiétudes du propriétaire et du front office. Les attentes sont relatives et même la plus petite des victoires compte.
Les Kings sont mort. Mais soyez prêts, car bientôt, nous chanterons à nouveau "Vive les Kings !"